Odilien Emmanuel Dibango, plus connu sous le nom de Manu Dibango, figure du jazz camerounais et ambassadeur de la francophonie dans le monde, nous a quittés il y a un an. Musicien hors pair, connu tout autour du monde, Manu fut et restera un grand activiste de la musique. Chez Syos, nous aimerions revenir sur sa vie afin de continuer à faire connaître son œuvre.
Manu Dibango est né le 12 décembre 1933 à Douala, mais il a passé la majeure partie de sa vie en France, où il est arrivé en 1949. Il finira sa scolarité à Reims, après être passé à Chartres et à Château-Thierry. C’est dans la cité des sacres qu’il s’initie au saxophone et commence à se produire en boîte de nuit ainsi que dans des bals, sans se dire qu’il pourrait faire sa vie en jouant. Lorsqu’il rate son baccalauréat en 1956 et que son père lui coupe les vivres, Dibango déménage à Bruxelles, où il tourne pendant quelque temps avant d’être embauché comme chef d’orchestre de la boîte Les Anges Noirs. C’est aussi à Bruxelles qu’il rencontre sa future femme, Marie-Josée, dite “Coco”.
Pendant les années 60, le Congo est en pleine lutte pour son indépendance. Dans la capitale belge se produisent souvent des artistes congolais, qui ne manquent pas non plus d’aller profiter des concerts locaux lorsqu’ils ne jouent pas. C’est ainsi que Joseph Kabasele, mieux connu sous le nom de Grand Kallé, rencontre Manu Dibango, et lui propose de devenir saxophoniste dans son orchestre de rumba, Indépendance cha cha. Ils enregistreront beaucoup à Bruxelles avant de repartir en Afrique, et Manu les accompagnera. Il s’installe donc à Léopoldville, qui est aujourd’hui Kinshasa, avec Marie-Josée, et y ouvre une boîte, le Tam-Tam. C’est là-bas, en 1962, qu’il commence à enregistrer des disques. Entre le Congo et la Belgique, il sortira plusieurs 45 tours, dont Twist à Léo, qui fera fureur en Afrique, donnant le rythme à des soirées twist endiablées dans le Tam-Tam.
À la fin des années 60, Dibango retourne s’installer en France, où il collabore avec d’autres grands musiciens, comme Dick Rivers ou Nino Ferrer. Il continue d’enregistrer, et sort un premier album intitulé Saxy Party, en 1969. Mais c’est trois ans plus tard, en 1972, que le succès international frappe à sa porte. Sur la face B d’un 45 tours, Manu a fait graver la chanson Soul Makossa, qui deviendra vite un classique mondial. Récupéré sans autorisation par Michael Jackson, et plus tard par Rihanna, Soul Makossa scelle le destin de son auteur. Il l’ajoutera un peu plus tard dans son album O Boso, sorti le 1er juillet de la même année, qui sera vendu par millions.
Soul Makossa lui ouvre les portes de l’Olympia, mais lui offre aussi une opportunité de se produire aux États-Unis. Il est invité à jouer dans de nombreuses salles de concert new-yorkaises, comme le Madison Square Garden. Il tournera aussi en Amérique du Sud. Par la suite, il sortira beaucoup d’autres albums, dans des styles différents, mais en gardant avec lui son saxophone et sa culture jazz. De là, Manu Dibango devient le colosse que l’on connaît aujourd’hui, et se produira sur d’autres grandes scènes tout autour du monde, sa vie durant.
Tout au long de sa carrière, Manu Dibango a utilisé son influence pour soutenir des causes importantes à ses yeux. Il a participé au concert pour la libération de Nelson Mandela à la fête de l’Humanité en 1985, s’est engagé dans diverses causes telles que l’action contre la faim dans le monde, la lutte contre le réchauffement climatique, et celle pour la liberté d’expression. Il est nommé artiste pour la paix de l’Unesco en 2004, et reçoit la Légion d’Honneur en 2010, parmi d’autres distinctions.
Manu Dibango a laissé derrière lui pas moins de 216 disques (albums, 45 tours, enregistrements de concerts…) en plus d’une marque indélébile sur le monde de la musique. À l’annonce de sa mort en 2020, dûe au Covid-19, beaucoup de gens ont posté des messages sur internet pour décrire l’impact qu’il a eu sur leurs vies, et à quel point sa musique était et restera influente. Si le cœur vous en dit, n’hésitez pas à nous faire part de vous souvenirs de Manu Dibango, en bas de cet article. Il nous manque à nous aussi, et nous écouterons ses morceaux aujourd’hui en sa mémoire, même s'ils font déjà partie de beaucoup de nos playlists !